jeudi 23 janvier 2014

Israël a une "conscience historique" mais l'Europe "refuse de voir le monde comme il va"

"Les grands théoriciens de l’Europe ont rêvé d’une union post-politique, plus encore que post-nationale. Cela ne marche pas, parce que l’État de droit et les droits de l’homme ne font pas une politique. Traumatisée par les morts du passé, l’Europe refuse de voir le monde comme il va. Certains pays, comme Israël, ont un ennemi à leurs frontières qui rêve de les conquérir, voire d’éliminer une partie de leur peuple. Cette conscience historique-là, l’Europe a choisi de ne pas l’avoir. Elle imagine ne pas avoir d’ennemi. Elle risque de le payer cher."

Source: Les nouveaux empires coloniseront l’Europe, entretien avec Hervé Juvin @ Causeur. Hervé Juvin est économiste et essayiste. Dernier ouvrage paru: La grande séparation- pour une écologie des civilisations, Gallimard, 2013.

"Ce n’est pas la nation qui a provoqué les guerres mondiales, mais des empires en proie à des dissensions internes, comme l’Autriche et l’Allemagne, qui ne parvenaient pas à « faire nation » ou ne le voulaient tout simplement pas. D’ailleurs, savez-vous qui a déclaré: «La nation, je l’ai utilisée, mais soyez bien conscient qu’il faut jeter cette notion complètement dépassée.» Adolf Hitler, en 1935! Il voulait remplacer la nation par l’idée de «race». Cela devrait nous alerter sur les dangers de l’idéologie post-nationale." [...]

"Malgré tous ses défauts, la création de l’euro a donné corps à l’idée d’une vie commune européenne. Si l’euro sautait, je ne suis pas sûr que l’Union européenne y résisterait sur un plan symbolique. La crise actuelle nous en donne un avant-goût. À Athènes, j’ai été frappé d’entendre des Grecs dire que l’Allemagne ne paierait jamais assez pour l’offensive d’Hitler qui permit à Mussolini de conquérir la Grèce pendant la dernière guerre. En face, les Allemands rétorquent que les Grecs ne paieront jamais assez car le front grec a fait perdre du temps à la Wehrmacht sur la route de Moscou. C’est bien la preuve que les vieux démons peuvent toujours resurgir." [...]


"Sur le plan de la politique étrangère, l’Europe a un mal fou à distinguer ses intérêts propres. C’est le signe d’un gros problème d’identité: l’UE ne sait tout simplement pas qui elle est! Diplomatiquement parlant, sauf pour ne rien faire, les Européens sont très rarement d’accord entre eux. En même temps, le fiasco de l’expédition occidentale en Libye, après les échecs irakien et afghan, nous confirme qu’on ne joue pas impunément avec les identités et le fameux nation-building ou state-building. Encore une invention moderne qui nie la condition politique de toute vie humaine!

Ne fallait-il pas intervenir en Libye pour sauver la population locale du massacre annoncé ?

La politique occidentale à l’égard de Kadhafi s’est toujours faite en dépit du bon sens. Dans les années 1980, lorsque le Guide libyen menaçait la paix de l’ensemble de l’Afrique et conduisait des actions terroristes, il n’a pas été renversé: seule sa famille a essuyé des représailles. Ce n’est qu’après la renonciation de Kadhafi à toute arme de destruction massive qu’on a mis fin à son règne, puis à ses jours. Je suis certain que ce dangereux précédent va inciter certains régimes à aller au bout de leur programme nucléaire ou non conventionnel pour survivre. Un certain nombre d’États ont compris que les promesses de l’Occident ne valaient rien, et qu’ils devaient donc développer leurs capacités militaires pour échapper aux risques d’ingérence que les manipulateurs d’émotions collectives peuvent toujours susciter!

Désapprouvez-vous toutes les ingérences ? L’an dernier, si l’Etat Malien a appelé la France à l’aide, c’est qu’il menaçait de s’effondrer sous la pression des djihadistes…

J’approuve l’opération «Serval» au Mali, qui est presque l’envers de l’attaque contre la Libye. Mais précisément, quelle logique y a-t-il à combattre au Mali des gens qu’on a armés en Libye? La même question se poserait si l’on intervenait en Syrie contre Bachar Al-Assad. Là-bas, où sont les «good guys» (les «gentils»), comme disent les Américains? Des armes parties de Libye et des mercenaires venus de partout affluent en Syrie au terme d’un périple invraisemblable. C’est la même chose en Centrafrique, car c’est aussi cela, la mondialisation!"

Le Parlement européen applaudit Abbas le Congrès américain applaudit Netanyahu
- Tonnerre d'applaudissements pour Mahmoud Abbas au Parlement européen

1 commentaire :

Anne juliette a dit…

"L'Europe est un petit cap du continent asiatique.' Paul Valéry.
Elle est l'extrémité occidentale du continent eurasiatique, voire une des sous-parties du super-continent de l'Afro-Eurasie. Wikipédia (pour une fois, ce site dit vrai).

Petit cap, extrémité, sous-partie : cela ne présage rien de bon. L'Europe sera phagocyté par l'Afrique et l'Asie : ce n'est qu'une question d'une à trois décennies.

Les juifs éparpillés dans le monde entier, très peu nombreux, avec leur puissant instinct migratoire qu'ils ont développé au fil des siècles et des millénaires pour fuir les persécutions, trouveront un point de chute en Israël ou en Amérique. Les chrétiens, non : beaucoup trop nombreux, faible instinct migratoire, absence de solidarité communautaire.