samedi 27 janvier 2018

I. Kertész: Des enfants "vont à l’école avec leurs cartables sur le dos pour se rencontrer à nouveau comme bourreaux et victimes dans les antichambres des fours crématoires"

Imre Kertész (1929-2016), écrivain hongrois, survivant des camps de concentration et lauréat du prix Nobel de littérature en 2002:
"(...) il faut se poser des questions sur la validité de la culture dont les valeurs illusoires étaient, ici, en Europe, enseignées à tous depuis la petite école, aussi bien aux tueurs qu’aux victimes."

"(...) des milliers d’enfants vont à l’école avec leurs cartables sur le dos pour se rencontrer à nouveau comme bourreaux et victimes dans les antichambres des fours crématoires, devant les fosses communes …" 
Femmes et enfants juifs hongrois arrivent au camp d'extermination
d'Auschwitz-Birkenau le 26 mai 1944 pour y être gazés.
"Mentionnerais-tu encore dans une même phrase Auschwitz et la croix?
Plus que jamais. Puisque c’est justement dans ce contexte qu’est apparue l’importance fatale d’Auschwitz pour l’homme éduqué dans la culture éthique de l’Europe. Les lois de cette culture sont résumées dans les dix commandements, dont l’un dit: Tu ne tueras point. Mais si les massacres peuvent devenir des activités ordinaires, voire un travail quotidien, il faut se poser des questions sur la validité de la culture dont les valeurs illusoires étaient, ici, en Europe, enseignées à tous depuis la petite école, aussi bien aux tueurs qu’aux victimes.

Tu esquisses une vision terrifiante: des milliers d’enfants vont à l’école avec leurs cartables sur le dos pour se rencontrer à nouveau comme bourreaux et victimes dans les antichambres des fours crématoires, devant les fosses communes … Nous en sommes arrivés là, c’est donc cela, le sujet de notre conversation ?  
Apparemment, dès qu’on parle de la culture et des valeurs européennes, on aboutit à la question du meurtre."

Imre Kertész, Dossier K., Actes Sud, 2008, (p. 178)

Wladimir Rabinovitch:
"Non, jamais plus nous serons comme les autres. Nous ne pouvons oublier. Nous n'oublierons jamais. Nous avons été "la balayure du monde". Contre nous chacun avait licence. Et c'est cela, mes amis, qui nous sépare de vous dans la liberté retrouvée, comme nous avons été séparés de vous sous l'Occupation. Nous sommes, désormais, des SÉPARÉS. Et nous sommes aussi les martyrs, c'est-à-dire les témoins, les témoins de l'abjection humaine."

Photos inédites de la Shoah

Nous avons été la "balayure du monde".

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